Une « vague de rénovations » pour l’Europe

Publié le 20 octobre 2020


La Commission européenne a adopté le 14 octobre 2020 une série de propositions et de rapports importants dans la mise en œuvre du « Green Deal » de l’UE, qui vise à atteindre la neutralité climatique d’ici 2050, ainsi que la réduction de ses émissions de gaz à effet de serre d’au moins 55% d’ici 2030 par rapport aux niveaux de 1990.

Cette stratégie, intitulée « Une vague de rénovation pour l’Europe – verdir nos bâtiments, créer des emplois, améliorer la qualité de vie » (A Renovation Wave for Europe), vise à doubler (au moins) le taux de rénovation énergétique des bâtiments dans les 10 prochaines années (à l’horizon 2030), à réduire les consommations d’énergie, à lutter contre la précarité énergétique et à décarboner le chauffage et la climatisation.

Les bâtiments sont responsables d’environ 40% de la consommation d’énergie de l’UE et de 36% de ses émissions de gaz à effet de serre provenant de l’énergie. Mais seulement 1% des bâtiments font l’objet de rénovations énergétiques chaque année, et seul 0,2 % du parc immobilier bénéficie de rénovations lourdes qui réduisent la consommation énergétique d’au moins 60 %. À ce rythme, la réduction des émissions de carbone du secteur de la construction afin d’atteindre la neutralité carbone prendrait des siècles. La mise en place d’un plan d’action plus efficace est donc cruciale pour amener l’Europe vers la neutralité climatique à l’horizon 2050.

Par ailleurs, avec près de 34 millions d’Européens incapables de chauffer correctement leur logement, les politiques publiques visant à promouvoir la rénovation énergétique des bâtiments doivent également apporter des réponses à la précarité énergétique, améliorer la santé et le bien-être des personnes vulnérables, et contribuer à réduire leurs factures d’énergie.

Objectifs de la Rénovation Wave

La Commission a recensé, sur la base de son analyse et d’une consultation publique, les domaines d’intervention et les grandes actions ci-dessous, qui sont essentiels pour faire évoluer radicalement l’ampleur et l’échelle des rénovations :

1) Renforcer l’information, la sécurité juridique et les incitations pour que les propriétaires et les locataires publics et privés entreprennent des rénovations.
La Commission révisera en 2021 la directive relative à l’efficacité énergétique et celle sur la performance énergétique des bâtiments. Parallèlement à l’introduction progressive de normes minimales obligatoires en matière de performance énergétique pour les bâtiments existants, elle proposera de renforcer l’obligation de disposer de certificats de performance énergétique (l’équivalent des étiquettes énergies de nos logements français).

2) Assurer un financement suffisant et bien ciblé : accroître le volume et l’efficacité du financement de l’UE en augmentant les subventions, l’assistance technique, l’aide au développement de projets et les prêts, avec des possibilités de combinaison inédites.
Pour doubler le taux de rénovations énergétiques dans les 10 prochaines années, l’investissement supplémentaire nécessaire devrait être de l’ordre de 90 milliards d’euros par an. Ce défi sans précédent nécessite des incitations publiques pour mobiliser les investissements privés nécessaires.
La Commission promouvra un véritable marché des services énergétiques et renforcera l’accès à un financement privé attractif au moyen de la stratégie renouvelée en matière de finance durable. Un soutien à l’accès aux services énergétiques essentiels devrait être disponible pour les personnes qui en ont besoin.

3) Accroître les capacités à préparer et à mettre en oeuvre des projets. La Commission intensifiera l’assistance technique et la rapprochera des acteurs régionaux et locaux.

4) Promouvoir des interventions de rénovation globales et intégrées pour des bâtiments intelligents, intégrer les énergies renouvelables et permettre de mesurer la consommation réelle d’énergie.

5) Adapter l’écosystème du secteur de la construction à la rénovation durable, sur la base de solutions circulaires, de l’utilisation et de la réutilisation de matériaux durables et de l’intégration de solutions fondées sur la nature. Cela implique de renforcer le savoir-faire et les compétences des travailleurs dans le secteur de la rénovation.

6) Utiliser la rénovation comme levier pour lutter contre la précarité énergétique et favoriser l’accès à un logement sain pour tous les ménages, y compris les personnes handicapées et les personnes âgées. La Commission présente une recommandation sur la précarité énergétique (disponible en anglais uniquement). Elle lancera une initiative en faveur du logement abordable qui portera sur 100 projets phares et examinera si et comment les ressources budgétaires de l’UE et les recettes du système d’échange de quotas d’émission de l’UE (SEQE-UE) peuvent être utilisées en parallèle pour financer des programmes nationaux d’efficacité énergétique et d’économies d’énergie ciblant la population à faibles revenus.

7) Promouvoir la décarbonation des systèmes de chauffage et de refroidissement, qui sont responsables de 80 % de l’énergie consommée dans les bâtiments résidentiels, au moyen de la révision, en 2021, de la directive sur les énergies renouvelables, de la directive sur l’efficacité énergétique et du SEQE-UE, de l’application et de l’extension des mesures d’écoconception et d’étiquetage énergétique , ainsi que d’un soutien aux approches par quartiers.

Une vaque de rénovations qui devra s’appuyer sur plusieurs documents stratégiques, dans chaque État-membre

Cette « Renovation wave » va s’appuyer sur plusieurs documents stratégiques, dont l’élaboration est exigée pour chaque État-membre :

  • Les « Plans nationaux pour la reprise et la résilience », qui doivent être présentés à la Commission avant le 30 avril 2021 pour pouvoir accéder au fonds « Facilité pour la reprise et la résilience », dans le cadre du Plan de relance européen suite à la crise COVID19 (doté de 672 milliards d’euros sur 3 ans, sous forme de subventions et de prêts aux États-membres) ;
  • Les « Plans nationaux intégrés en matière d’énergie et de climat » (PNEC), requis en vertu du système de « Gouvernance de l’union européenne de l’énergie » : s’il existe bien une politique énergétique européenne, l’énergie n’est pas à proprement parler une compétence pleine de l’Union européenne. Chaque État peut ainsi décider de son mix énergétique, de l’exploitation de ses ressources et de son approvisionnement en énergie. Pour autant, les États doivent coopérer au sein d’une « Gouvernance de l’union européenne de l’énergie », qui fixe le cadre pour la transition énergétique en Europe et détermine les moyens d’atteindre collectivement les objectifs climatiques et énergétiques, tout en permettant de mettre l’ambition européenne au niveau de l’accord de Paris sur le climat. Les PNEC intègrent des dispositions en matière de lutte contre la précarité énergétique.
  • Les « Stratégies nationales de rénovation à long terme », qui devaient être notifiées à la Commission par chaque État-membre d’ici le 10 mars 2020, dans le cadre de la Directive sur la performance énergétique des bâtiments (et intégrer les objectifs adoptés via l’Accord de Paris sur le Climat).

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