Interdiction de location des passoires thermiques : le risque pour les locataires
Le projet de loi Climat et résilience, actuellement débattue au Parlement, prévoit l’interdiction de louer des passoires thermiques à partir de 2025 pour les classes G et 2028 pour les classes F. Dans un article d’AEF info (réservé aux abonnés) paru le 18 juin, l’Association des comités de défense des locataires (ACDL) s’inquiète des conséquences d’une telle mesure pour les locataires en situation de précarité énergétique.
Le risque des « congés représailles » pour les locataires
Le locataire qui viendrait demander une mise aux normes énergétique de son logement pourrait en effet se voir donner par le bailleur un « congés représailles » pour des motifs parfois non appliqués (comme la vente du bien, la reprise pour occuper le logement ou des travaux lourds) laissant ensuite la possibilité au bailleur de relouer le logement à d’autres personnes vulnérables et sans effectuer les travaux de rénovation énergétique. Ainsi l’intégration d’un critère de performance énergétique dans la notion de décence d’un logement risquerait d’augmenter ce type de situation pour les locataires et plus largement fait reposer sur ces derniers la dénonciation du non-respect des exigences de performance énergétique d’un logement loué.
Inciter les bailleurs à réaliser les travaux tout en protégeant les locataires
Certaines mesures à intégrer dans la loi Climat et résilience permettraient d’inciter les propriétaires bailleurs à rénover les passoires thermiques tout en protégeant le bail des locataires. C’est d’ailleurs l’objet des amendements déposés par la sénatrice de Paris Marie-Noëlle Lienemann et notamment :
- La mise en place d’un « arrêté de précarité énergétique », sur le modèle de l’arrêté de péril, qui permettrait à un maire ou président d’EPCI de « prescrire l’exécution de travaux de rénovation énergétique pour des locaux d’habitation » considérés comme des passoires thermiques dès 2028. Celui-ci pourrait également « procéder à tous contrôles qui lui paraissent utiles à l’effet de vérifier la performance énergétique du logement » et que le bailleur prenne à sa charge l’hébergement du locataire si les travaux de rénovation ne permettent pas un bon usage du logement.
- La modification l’article 20-1 de la loi du 6 juillet 1989 précisant que « le locataire est fondé à demander au propriétaire la mise en conformité des lieux loués sans que le bailleur ne puisse contester ni son engagement locatif », qu’il puisse avoir à accès à certains documents permettant d’appuyer sa demande (comme le constat de non-décence de la CAF ou le diagnostic de performance énergétique – centralisé par l’Ademe et l’Anah) et que le bail (et donc les loyers) puisse être suspendu le temps que les travaux soient effectués.
- Un amendement permettant à un organisme payeur d’allocations (CAF ou MSA) et aux collectivité (commune ou EPCI) « de s’associer à l’action du locataire, notamment par la voie d’une intervention à titre volontaire devant le juge ».
« On ne peut plus obliger les locataires à lancer des démarches difficiles pour d’abord annoncer à son bailleur qu’il entend faire reconnaître la non-décence de son logement, puis obtenir des travaux, ce sont des années qui s’écoulent, et pendant ce temps, le bailleur peut donner congé à son locataire avant même que le jugement n’ait été obtenu », a confié Benoît Filippi, porte-parole de l’ACDL, à AEF info.