Cette nouvelle étude réalisée par l’Institut Négawatt et Dorémi se base sur des constats structurants sur les dynamiques de la rénovation énergétique :
• Il est nécessaire de changer d’échelle en nombre de rénovations et en niveau de performance de ces rénovations ;
• La rénovation complète et performante a fait ses preuves (avec une division par 4 à 8 des factures de chauffage), et elle doit être généralisée ;
• Les dispositifs actuels de financement, d’accompagnement et de travaux orientent encore trop vers la rénovation « par gestes », partielle, et ils ne sont pas adaptés à la rénovation performante.
L’étude se focalise sur ces 8 millions de passoires énergétiques construites avant la première réglementation thermique de 1975, parmi les plus consommatrices de chauffage en France. Elle vise à concevoir des mécanismes de financement à la rénovation performante adaptés à la situation de chaque propriétaire de maison individuelle quelle que soit sa situation (revenu, âge, endettement…), sans accroître ses charges contraintes, donc en préservant son pouvoir d’achat.
Une « Offre universelle de financement »
L’étude pose ainsi le cadre de ce que peut être une « Offre Universelle de Financement » de la rénovation performante dont les caractéristiques fondamentales sont les suivantes :
• Elle permet au ménage d’atteindre un « équilibre en trésorerie » : la facture de chauffage avant travaux est supérieure ou égale au montant du remboursement du financement + la facture de chauffage résiduelle après travaux ;
• Elle est remboursée par une mensualité unique, intégrant les aides et subventions, et ne requiert pas d’avance de trésorerie par le ménage ;
• Elle s’intègre dans une offre complète, prenant en compte non seulement le financement des travaux, mais également l’accompagnement dans la réalisation et le suivi qualité des travaux.
Quatre mécanismes financiers, basés pour l’essentiel sur des dispositifs existants
L' »Offre Universelle de Financement » repose sur des caractéristiques telles que l’équilibre en trésorerie[1], une mensualité unique de remboursement intégrant aides et subventions sans avance de trésorerie et une proposition d’offre complète comprenant financement, accompagnement et suivi du projet.
Voici les 4 mécanismes financiers complémentaires proposés, basés pour l’essentiel sur des évolutions de dispositifs existants, ainsi que sur le système d’aides actuel :
- L’éco-Prêt à Taux Zéro rénovation performante est une adaptation de l’éco-PTZ actuel qui vise à le rendre plus attractif pour les acteurs financiers, et plus adapté en termes de plafond et de maturité pour la rénovation performante. Ce prêt peut être proposé à tous types de ménages dès lors qu’il satisfait aux contraintes de solvabilité classiques imposées par les banques notamment le taux d’endettement, il ne prend donc pas en compte les économies d’énergie dans les critères d’octroi. Ainsi, il ne s’adresserait pas en priorité aux ménages très modestes et âgés.
- Le prêt rénovation performante propose une offre de prêt complémentaire aux ménages ayant un profil de risque plus élevé et/ou ayant atteint le plafond de leur capacité d’endettement. À la différence de l’éco-PTZ, les économies d’énergie sont prises en compte comme véritables sources de financement, ce qui permet d’améliorer la solvabilité du ménage. Qui plus est, ce prêt devient de plus en plus intéressant au fur et à mesure que le coût de l’énergie augmente. Ce produit est donc particulièrement adapté aux ménages non solvables et payant des factures d’énergies élevées.
- Le Prêt Avance Mutation rénovation performante s’adresse aux ménages ne pouvant pas accéder aux deux premiers mécanismes. Il découle du Prêt Avance Rénovation instauré par la loi Climat et Résilience. Il se rapporte à un prêt garanti par hypothèque, dont le remboursement des intérêts et du capital a lieu soit grâce aux économies d’énergie, soit à la vente du bien (mutation ou décès). Ce dispositif serait destiné en priorité aux ménages très modestes âgés. Il cible également les autres catégories de ménages ne disposant pas de réserve de capacité d’emprunt.
- Le tiers-investissement permet au ménage de faire financer entièrement ou partiellement son projet par un tiers-investisseur, généralement une société de services énergétiques. Le tiers investisseur apporte les fonds, gère l’ensemble du projet et garantit les économies d’énergies au travers d’un contrat de service assorti de versements (loyers, redevances). Le tiers-investissement est destiné à tous les ménages propriétaires.
20 propositions pour rendre ces mécanismes opérants
Pour rendre ces mécanismes opérants, l’étude émet 20 propositions, comme la prise en compte des économies de chauffage dans les critères d’octroi de prêt, l’augmentation des maturités de prêts, le compte travaux pour les ménages, ou des mesures incitatives pour les établissements financiers. L’attachement à la pierre de la dette est également analysé : il s’agit d’un mécanisme permettant la transmission de la dette entre les occupants successifs d’un bien rénové. Son intérêt fondamental réside dans l’augmentation de la durée du prêt, qui permet elle-même de réduire les mensualités et donc de sécuriser, ou de systématiser, l’équilibre en trésorerie. Il peut également permettre, à terme, le financement systématique par le ménage de l’accompagnement et du suivi qualité des travaux.
Une étude des mécanismes proposés sur 12 cas-types
En se basant sur une modélisation de cas-types grâce à un outil développé par I4CE (Institute for Climate Economics), l’étude montre enfin que les mécanismes financiers proposés permettent de financer la rénovation performante dans des conditions favorables pour les ménages comme pour les pouvoirs publics.
Sur les 12 cas étudiés (6 maisons représentatives du parc, pour deux profils de ménage différents) :
- Pour les ménages avec capacité d’endettement, il est possible dans 4 cas sur 6, de parvenir à une offre de financement avec équilibre en trésorerie sur 25 ans, sans apport du ménage, et avant toute aide directe de l’Etat + CEE. Toute aide directe supplémentaire, permettra alors d’améliorer l’attractivité du projet de rénovation.
- Pour les ménages sans capacités d’endettement, les dispositifs proposés par l’OUF rendent possible, dans 5 cas sur 6, un projet de rénovation performante avec un coût pour l’Etat (subventions directes plus dotations éco-PTZ rénovation performante ou prêt rénovation performante fondé sur les économies d’énergies) inférieur au coût des dispositifs actuels.
Consulter le rapport d’étude et sa synthèse :
Consulter également l’étude de l’Institut négaWatt « Résorber la précarité énergétique et rénover les passoires thermiques ».
[1] L’équilibre en trésorerie consiste en ce que les mensualités d’un prêt à la rénovation correspondent aux économies réalisées après travaux.