Selon une étude publiée par l’INSEE au mois de juillet, 14 % de la population de France métropolitaine était en situation de privation matérielle et sociale début 2022.
Cet indicateur repère les personnes ne pouvant pas couvrir les dépenses liées à au moins cinq éléments de la vie courante sur treize considérés comme souhaitables, voire nécessaires pour avoir un niveau de vie acceptable (comme pouvoir chauffer son logement à la bonne température, s’acheter des vêtements neufs, accéder à Internet ou se réunir avec des amis autour d’un verre ou d’un repas au moins une fois par mois).
L’inflation ayant affaibli le pouvoir d’achat des ménages, la proportion de personnes en situation de privation matérielle et sociale a atteint son plus haut niveau depuis 2013, la première année où elle a été mesurée.
1 personne sur 10 n’a pas les moyens de se chauffer correctement
Parmi l’ensemble des difficultés déclarées, celle liée au chauffage du logement est en forte augmentation : début 2022, 10 % des personnes vivent dans un ménage qui n’a pas les moyens financiers de chauffer correctement son logement, contre 5 à 7 % entre 2014 et 2021. L’aggravation de la difficulté à se chauffer est à corréler avec la hausse des prix de l’énergie de l’hiver 2021-2022, en particulier celle du fioul.
Des disparités entre les territoires ruraux et urbains
Les habitants des zones rurales ressentent davantage la hausse des prix de l’énergie, leurs dépenses en chauffage et carburants étant plus élevées. Début 2022, la fréquence des situations de privation matérielle et sociale augmente nettement par rapport à 2020 dans les communes rurales, et dans une moindre mesure dans les communes urbaines de densité intermédiaire. À l’inverse, depuis 2020, elle recule dans les grands centres urbains. Les territoires ruraux restent cependant les territoires abritant la plus faible proportion de personnes en situation de privation matérielle et sociale en 2022 (11 % contre 15 à 16 % dans les territoires urbains).
Les privations plus importantes chez les familles monoparentales et les familles nombreuses
Le risque de privation matérielle et sociale est fortement lié au niveau de vie, à la catégorie socioprofessionnelle, au niveau de diplôme, à l’âge et au type de ménage. Les familles monoparentales, et dans une moindre mesure les familles nombreuses, sont particulièrement exposées : début 2022, 3 personnes sur 10 vivant dans des familles monoparentales étaient en situation de privation matérielle et sociale, et 2 personnes sur 10 au sein des couples avec trois enfants ou plus. Le taux de privation augmente nettement pour ces types de ménage depuis deux ans.
Privation et sentiment d’exclusion
Les personnes en situation de privation font état d’un mal-être beaucoup plus présent que dans le reste de la population, et l’isolement relationnel est vécu plus fortement. Cet isolement se traduit par un sentiment de solitude plus fréquent, et parfois par l’absence de soutien : 25 % des adultes en situation de privation matérielle et sociale déclarent ne pas avoir de famille, d’amis ou de voisins à qui ils peuvent demander de l’aide morale, matérielle ou financière, contre seulement 7 % des adultes n’étant pas dans cette situation. À côté de cet isolement relationnel, les conditions de vie difficiles s’accompagnent aussi plus fréquemment d’un sentiment d’exclusion : 27 % des adultes en situation de privation se sentent exclus de la société, contre 7 % des adultes qui ne le sont pas.
Une tendance confirmée par les associations qui œuvrent sur le terrain
A l’heure où le Gouvernement présente son nouveau plan de lutte contre la pauvreté, plusieurs associations caritatives viennent abonder le constat de l’Insee et tirent la sonnette d’alarme sur l’aggravation de la pauvreté en France. C’est le cas notamment du Secours populaire qui indique dans son dernier baromètre annuel que 18 % des Français (+3 points) vivent à découvert ou encore que 45% (+4 points) d’entre eux ont des difficulté pour payer leurs dépenses d’énergies. Les Restos du cœur déplorent également une hausse des nouveaux inscrits à l’aide alimentaire : en 2023, près de 1,3 million de personnes ont bénéficié des repas distribués par l’association contre 1,1 million en 2022. La Fondation Abbé Pierre estime quant à elle, dans son 28e rapport annuel, publié début février, à 4,15 millions le nombre de personnes mal ou non logées en 2022.
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