Le 27ème rapport annuel de la Fondation Abbé Pierre dresse un nouvel état des lieux du mal-logement en France.
La Fondation Abbé Pierre constate que la crise du logement se superpose à la crise sanitaire et continue de fracturer en profondeur notre société dans un pays marqué par la précarisation de couches entières de la population. Les jeunes, les habitants les plus précaires et les plus isolés des quartiers populaires, et les personnes exilées sont les premières victimes.
Selon la Fondation Abbé Pierre :
- 4,1 millions de personnes sont non ou mal logées
- 14,6 millions de personnes sont fragilisées par la crise du logement
Elle souligne que le mandat d’Emmanuel Macron, plein de promesses en matière de lutte contre le mal-logement et la pauvreté (« choc de l’offre » de logements, accès important au « Logement d’abord »), s’achève en réalité bien loin du compte et les plus pauvres restent les oubliés de ce quinquennat.
- 300 000 personnes sans domicile fixe. « Ce chiffre a plus que doublé depuis 2012, et triplé depuis 2001 » indique la Fondation Abbé Pierre.
Des choix budgétaires et fiscaux, profondément inégalitaires, n’ont pas favorisé les politiques du logement et notamment en direction des personnes les plus pauvres. La politique du « Logement d’abord », malgré des avancées remarquées, est restée marginale au profit de solutions d’urgence précaires.
La Fondation pointe également les coupes dans les aides personnelles au logement (APL) comme symboles de l’injustice des choix budgétaires et montre que les perdants sont plus nombreux que les gagnants. Sur six millions d’allocataires, 30 % ont perdu en moyenne 73 euros (400 000 ménages ont même perdu toute allocation). Le principal gagnant est au final l’État, qui réalise 1,1 milliard d’euros d’économies en 2021.
Le logement social est en outre désigné dans le rapport comme le mal-aimé du quinquennat. La baisse continue des aides à la pierre pour les organismes Hlm et la lourde ponction que leur impose l’État à travers la « Réduction de loyer de solidarité » (RLS) entravent non seulement la production de logements sociaux supplémentaires (la construction n’a jamais été aussi basse depuis 15 ans) mais aussi les efforts des bailleurs pour l’entretien et la rénovation de leur patrimoine. Entre 2018 et 2022, l’État aura privé les organismes Hlm de six milliards d’euros.
Toutefois, au crédit du quinquennat, la Fondation Abbé Pierre reconnaît des points plus positifs ou a minima en demi-teinte tels que :
- le renouvellement des dispositions de la loi SRU sur les quotas de logements sociaux, en regrettant toutefois l’insuffisante pression sur les communes qui ne respectent délibérément pas leurs obligations en la matière ;
- la rapide montée en puissance, depuis 2019-2020, de la rénovation énergétique, secteur dans lequel les ambitions sont fortes mais les résultats encore insuffisants en raison du faible nombre de rénovations globales au profit de travaux isolés ;
- le chèque énergie revalorisé, mais qui, avec une moyenne de 148 euros par an, ne compense pas suffisamment l’augmentation des dépenses des ménages modestes en ce domaine ;
- la création du fonds friche, jugé très utile ;
- les quelques avancées législatives en matière de lutte contre le logement indigne mais domaine dans lequel les moyens sont insuffisants et les sanctions encore trop occasionnelles ;
- le rétablissement de l’encadrement des loyers, mais on déplore son caractère facultatif et expérimental.
Ce 27ème rapport énonce des préconisations pour « soigner une France fracturée par la crise du logement » et parmi elles :
- en matière de rénovation énergétique, aller davantage vers des rénovations globales, qui ne représentent aujourd’hui que 1% des primes versées, contre 86% pour les travaux ponctuels ;
- le doublement du chèque énergie et la suppression des coupures ;
- sur la lutte contre l’habitat indigne, la création d’une Agence nationale des travaux d’office, destinée à mutualiser les compétences et permettre aux villes de petites tailles de faire face, seules, à des procédures complexes.
La Fondation en appelle à une mobilisation générale accompagnée de nouvelles politiques de la part de l’État mais aussi d’une implication sans faille des collectivités locales. Le mal-logement n’est pas une fatalité.
Visionner le replay de la présentation du rapport sur l’état du mal-logement en France
Consulter l’article de décryptage de la Banque des territoires